Les employeurs publics ont-ils le droit d'accéder aux informations contenues dans l'ordinateur d'un agent lorsqu'il est en maladie ?

Selon une jurisprudence judiciaire constante, les dossiers et fichiers créés par le salarié grâce à l'outil informatique mis à sa disposition pour l'exécution de ses fonctions, sont présumés, sauf si le salarié les identifie comme personnels, avoir un caractère professionnel, de sorte que l'employeur est libre de les consulter, même en l'absence de l'intéressé (Cass, social, 18 octobre 2006, n°04-48.025). Si l'on applique cette jurisprudence aux employeurs publics, ces derniers sont ainsi en droit d'accéder aux informations contenues dans l'ordinateur et le matériel informatique mis à disposition d'un agent, lorsque celui-ci est absent. En particulier, l'employeur peut exiger de l'agent en congés de maladie qu'il lui communique les codes d'accès à son ordinateur (Cass.soc, 18 mars 2003, n°01-41.343). Ce droit d'accès s'exerce sous réserve des restrictions résultant du respect dû à la vie privée et à la protection des données personnelles. La Commission nationale informatique et libertés (CNIL) précise que l'employeur peut avoir connaissance du mot de passe d'un salarié absent, à la condition que ce dernier détienne sur son poste informatique des informations nécessaires à la poursuite de l'activité de l'entreprise et que l'employeur ne puisse accéder à ces informations par d'autres moyens. En outre, l'employeur ne peut en principe accéder, hors de la présence de l'intéressé, aux fichiers « personnels » expressément identifiés comme tels. Il n'a pas non plus le droit de prendre connaissance des messages personnels émis et reçus par l'agent grâce à l'outil informatique mis à sa disposition pour son travail (Cass.soc, 2 octobre 2011, n°99-42.942).
Codes d'accès à l'ordinateur professionnel d'un fonctionnaire territorial absent pour cause de maladie - Sénat
Codes d'accès à l'ordinateur professionnel d'un fonctionnaire territorial absent pour cause de maladie
14e législature
Question écrite n° 19576 de M. Jean Louis Masson (Moselle - NI)
publiée dans le JO Sénat du 14/01/2016 - page 119
M. Jean Louis Masson demande à M. le ministre de l'intérieur si lorsqu'un fonctionnaire territorial est absent pour cause de maladie, la collectivité peut, pour le bon fonctionnement du service, exiger de ce fonctionnaire qu'il lui fournisse les codes d'accès à son ordinateur professionnel.
Réponse du Ministère de l'intérieur
publiée dans le JO Sénat du 08/12/2016 - page 5384
Selon une jurisprudence judiciaire constante, les dossiers et fichiers créés par le salarié grâce à l'outil informatique mis à sa disposition pour l'exécution de ses fonctions, sont présumés, sauf si le salarié les identifie comme personnels, avoir un caractère professionnel, de sorte que l'employeur est libre de les consulter, même en l'absence de l'intéressé (Cass, social, 18 octobre 2006, n°04-48.025). Si l'on applique cette jurisprudence aux employeurs publics, ces derniers sont ainsi en droit d'accéder aux informations contenues dans l'ordinateur et le matériel informatique mis à disposition d'un agent, lorsque celui-ci est absent. En particulier, l'employeur peut exiger de l'agent en congés de maladie qu'il lui communique les codes d'accès à son ordinateur (Cass.soc, 18 mars 2003, n°01-41.343). Ce droit d'accès s'exerce sous réserve des restrictions résultant du respect dû à la vie privée et à la protection des données personnelles. La Commission nationale informatique et libertés (CNIL) précise que l'employeur peut avoir connaissance du mot de passe d'un salarié absent, à la condition que ce dernier détienne sur son poste informatique des informations nécessaires à la poursuite de l'activité de l'entreprise et que l'employeur ne puisse accéder à ces informations par d'autres moyens. En outre, l'employeur ne peut en principe accéder, hors de la présence de l'intéressé, aux fichiers « personnels » expressément identifiés comme tels. Il n'a pas non plus le droit de prendre connaissance des messages personnels émis et reçus par l'agent grâce à l'outil informatique mis à sa disposition pour son travail (Cass.soc, 2 octobre 2011, n°99-42.942).
https://www.senat.fr/questions/base/2016/qSEQ160119576.html
Rappel des règles relatives à la consultation du dossier individuel des fonctionnaires

La loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires dispose que « tout fonctionnaire a accès à son dossier individuel dans les conditions définies par la loi » (article 18). Le dossier du fonctionnaire doit comporter toutes les pièces intéressant la situation administrative de l'intéressé, enregistrées, numérotées et classées sans discontinuité. Le fonctionnaire peut consulter librement son dossier en application du droit d'accès aux documents administratifs prévu par la loi du 17 juillet 1978 modifiée portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public.
Le juge administratif a confirmé que le dossier individuel d'un agent présente le caractère d'un document administratif, communicable à cet agent sur le fondement du II de l'article 6 de la loi du 17 juillet 1978 précitée (CE, 11 juillet 1988, Coiffier). L'agent n'est pas tenu de motiver sa demande. Pour assurer une tracabilité de la demande et le respect de la voie hiérarchique, l'agent qui souhaite consulter son dossier individuel doit en faire la demande par écrit à son supérieur hiérarchique. La pratique veut que l'administration, pour des raisons d'organisation et de bon fonctionnement des services, propose au demandeur un rendez-vous afin de consulter son dossier individuel.
Le cadre légal fixé par la loi précitée du 17 juillet 1978 offre des garanties à l'exercice de ce droit. En application de l'article 17 du décret du 30 décembre 2005 relatif à la liberté d'accès aux documents administratifs, l'administration est tenue de répondre à une demande d'accès à un document administratif dans le délai d'un mois. Au-delà, l'absence de réponse équivaut à un refus. Au jour de la notification du refus ou de l'expiration du délai d'un mois, le demandeur peut saisir la commission d'accès aux documents administratifs (CADA), autorité administrative indépendante chargée de veiller au respect de la liberté d'accès aux documents administratifs.
La CADA rend un avis sur la demande, qui est notifié à l'intéressé et à l'autorité administrative. L'administration informe la CADA de la suite qu'elle entend donner à la demande. Si l'autorité administrative confirme son refus, expressément ou en gardant le silence, l'agent peut déférer son refus au juge administratif. Le choix des modalités de communication appartient au demandeur, dans la limite des possibilités techniques de l'administration. L'accès au dossier s'exerce soit par consultation gratuite sur place, soit par la délivrance d'une copie aux frais de la personne qui le sollicite (à la condition que la reproduction ne nuise pas à la conservation du document), soit par courrier électronique et sans frais lorsque le document est disponible sous forme électronique.
Une copie peut aussi être adressée au domicile de l'agent moyennant le paiement des frais de l'envoi postal. En revanche, si le dossier est trop volumineux, l'administration peut, pour ne pas perturber le bon fonctionnement de ses services, refuser d'envoyer des copies et inviter l'agent à le consulter sur place. Il est préconisé de faire émarger et dater la consultation par l'agent, en mentionnant les éventuelles copies. Le dossier peut être communiqué à un avocat ou à un tiers ayant reçu mandat. Il est conseillé qu'un représentant de l'administration soit présent sur place lors de la consultation. L'agent a le droit de formuler des observations qui seront consignées en annexe du document.
L'administration ne peut pas modifier le contenu du dossier à la demande de l'agent, sauf lorsque la loi oblige à supprimer certaines mentions ou à ajouter des pièces qui devraient y figurer. Le droit à communication s'applique aussi bien au dossier de carrière tenu par le service gestionnaire qu'au dossier tenu par le service affectataire (dit « dossier individuel local », « dossier de service », « dossier de travail »...). En dehors de ce régime général fixé par la loi du 17 juillet 1978 précitée, le droit d'accès s'applique également dans le cadre de procédures spécifiques. L'article 65 de la loi du 22 avril 1905 dispose en effet que « les fonctionnaires ont droit à la communication personnelle et confidentielle de toutes les notes, feuilles signalétiques et tous autres documents composant leur dossier, soit avant d'être l'objet d'une mesure disciplinaire ou d'un déplacement d'office, soit avant d'être retardés dans leur avancement à l'ancienneté ».
En cas de procédure disciplinaire, l'agent a le droit d'obtenir communication de l'intégralité de son dossier individuel et des documents annexes. L'administration est tenue d'informer l'agent de son droit à communication du dossier (article 19 de la loi du 13 juillet 1983 précitée). Un délai suffisant pour préparer sa défense doit lui être accordé. L'intéressé peut accorder à son défenseur le droit d'en obtenir communication avec mandat (l'avocat en est dispensé). Enfin, l'agent a également le droit d'obtenir communication de son dossier individuel préalablement à des mesures prises en considération de la personne. Cette obligation de communication ne s'applique toutefois pas en cas de licenciement pour insuffisance professionnelle, suspension de fonctions ou abandon de poste.